Notre histoire / Le pilori de Bellot
Le pilori de Bellot
Pilori : poteau où l’on attachait les condamnés que l’on exposait aux regards du public. (dictionnaire Larousse).
En des temps où la présomption d’innocence était souvent remplacée par la certitude de culpabilité, c’est de cette manière, barbare mais probablement dissuasive, que l’on faisait connaître au bon peuple les délinquants locaux.
Le seigneur de Bellot, au XVIIIème siècle était "haut justicier". En droit féodal, cela signifie qu’il avait le pouvoir de rendre la justice et qu’il était habilité à prononcer jusqu’à des peines capitales pour des faits graves survenus dans l’étendue de sa seigneurie. Il disposait, à ce titre, d’un droit de fourches patibulaires (gibet) à deux piliers et d’un droit de pilori. C’est ce dernier qui nous intéresse.
Où installer un pilori, à Bellot, pour qu’il soit visible de tous ? Au carrefour proche de l’église, bien sûr. Imaginez ce carrefour, il y a près de 250 ans : toute la place devant l’église est occupée par le cimetière. En face, de l’autre côté du chemin de Rebais, se trouvent quelques commerces dont, à l’angle du chemin de Doucy, l’auberge de la Croix blanche, tenue par Pierre-Paul Choiseau (l’unique magasin d’alimentation de Bellot aujourd’hui). La route de Villeneuve-sur-Bellot n’existe pas encore (elle ne sera construite qu’à partir de 1843). À son emplacement se dresse un corps de ferme.
C’est de l’autre côté de l’entrée du cimetière, donc en face de l’auberge de la Croix blanche, qu’est installé le pilori du seigneur de Bellot. Il est "rétabli" – ce qui signifie qu’il y en avait un autre auparavant – le 10 mai 1774, un procès-verbal dressé par Gabriel Drouet, procureur en la justice de Bellot, en fait foi. Sont présents et témoins : Étienne Boquillon, notaire de Bellot et procureur fiscal du seigneur local, Demarle, greffier, et Georges Barré, porte-caisse (tambour).
Il est constitué, nous dit le procès-verbal, d’un « poteau décoré des armes de nos Seigneur et Dame dudit lieu (*), savoir : une plaque de tôle attachée sur la face du devant, tournée vers ladite rue de Rebais, avec au-dessus une chaîne scellée d’un crampon dans ledit poteau, soutenant un collier de fer suspendu en la manière ordinaire aux piloris et poteaux de cette nature, pour y exposer les coupables qui auront été condamnés suivant l’exigence des cas, et ce pour marque et en témoin des droits de la haute justice desdits Seigneur et Dame sur toute l’étendue de ladite terre et seigneurie de Bellot". Brrr … Voilà qui ne donne guère envie d’y être exposé ! Quand a-t’il été abattu ? Nous n’en avons pas trace mais probablement peu après la Révolution car c’était un emblème trop évident de la féodalité et de ses excès.
(*) René Théophile II de Maupeou (prononcer Maupou) et son épouse, seigneurs de Sablonnières, Bellot, Montflageol et autres lieux. Ce seigneur, comme tant d’autres, émigrera en 1791. Il ne reverra jamais Bellot : il décèdera en effet à Tournai en 1793.
Claude MACÉ - CGBrie 1475
Sources :
- Terrier de Bellot (archives notariales de Villeneuve-sur-Bellot).
- Livre "Bellot, d’hier à aujourd’hui", disponible en Mairie de Bellot.